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Quelque part en Californie du Sud
Le cerveau de Rob se remit en route. Ce fut d’abord l’odeur qui le frappa – une nauséabonde odeur de toilettes. Puis le ciment froid contre sa joue. Ça n’avait aucun sens. Il n’était pas dans la bagnole d’un mec ? Mais qu’est-ce que… ?
Il se rendit compte qu’il était nu et qu’on lui avait attaché les poignets et les chevilles avec des liens en plastique. Un frisson glacé le parcourut et son estomac se noua.
Bon Dieu, ce que ça pue là-dedans. Où ça, d’ailleurs ?
Il regretta de ne pas pouvoir remonter le temps et sortir à Tom et Chris : Non, je m’en tape si vous pensez que je suis un trouillard, on devrait pas monter en bagnole avec ce malade. On devrait rentrer pour potasser nos cours comme nous le répètent constamment nos parents.
La pièce était plongée dans l’obscurité et Rob entendit un gémissement à côté de lui. Chris devait se réveiller. Si Rob n’avait pas été aussi terrifié, il se serait mis en devoir de l’engueuler et de lui dire qu’il était vraiment trop con.
Soudain, la pièce fut baignée d’une lumière crue.
Le dingue au masque se tenait à côté d’un lampadaire. Plus de vêtements. Ce que Rob avait pris pour un simple masque était en fait un costume qui le recouvrait de la tête aux pieds. Enfin, presque.
Le truc qui sortait sur le devant n’était pas recouvert.
Rob n’avait pas vu beaucoup de mecs nus. Il avait seulement dix-sept ans. Bien sûr, si on succombe à la curiosité et qu’on jette un peu trop de regards furtifs dans les douches, on risque de se faire passer une dérouillée. Mais, malgré son peu d’expérience en la matière, Rob trouva que ce mec était vraiment énorme de ce côté-là. C’était disproportionné pour un être humain, et encore plus sur ce corps d’anorexique.
Le dingue s’avança vers eux, quelque chose dans chaque main, son engin oscillant un peu à chaque pas. Rob se dévissa le cou pour mieux voir : Oh, merde, et si c’étaient des armes ?
L’homme ouvrit la fermeture Éclair devant sa bouche et déposa les objets sur le sol.
Un balai.
Une batte de base-ball.
Puis il se releva et commença à se masturber.
— Qu’est-ce que vous allez nous faire ? demanda Rob, qui regretta aussitôt sa question.
— Je crois que tu le sais très bien, ce que je vais vous faire, dit le dingue. Mais j’ai envie de vous laisser le choix. Il y a… moi. Le balai. Ou la batte. Décidez tous les trois. Par qui ou par quoi. Ou bien vous préférez que ce soit moi qui décide ?
Rob baissa les yeux. En fait, le type portait une capote toute blanche. Tellement serrée qu’on voyait les veines. Putain de merde. Mais c’est quoi, ce truc ? Et qu’est-ce que c’est que cette histoire de choix ? Par qui ou par quoi… Oh, mon Dieu, sortez-nous de là. Si seulement quelqu’un pouvait nous entendre et venir à notre secours…
— Qu’est-ce que vous faites ? cria Chris. On vous a rien fait, nous !
— Je mesure vingt-cinq centimètres en érection. Le balai mesure quatre-vingt-dix de long pour cinq de diamètre. La batte en bois ne fait que soixante-dix de long, mais pour un diamètre de quinze. Mais ne vous inquiétez pas. Je possède quelques instruments, au cas où vous auriez besoin d’un peu d’aide.
Des instruments ? Mais c’était quoi, ce malade ?
— Si vous n’arrivez pas à vous décider, les gronda Sqweegel, je choisirai pour vous.
Rob s’en voulut de son choix, mais il savait qu’il fallait être le premier, avant que les autres aient eu le temps de réagir.
Il essaya de rester insensible à ce qui s’ensuivit. Aux protestations de Chris et de Tom, qui comprenaient ce que cela signifiait pour eux. Au contact des mains glacées de ce dingue sur ses hanches. À ses halètements dans son dos. À ses grognements. Au bout d’un moment, il imagina que son corps était fendu en deux jusqu’à sa poitrine.
Après ce qui lui parut une éternité, tout s’arrêta. Rob l’entendit se frotter les mains.
— C’était juste un échauffement, dit le dingue. Maintenant, on va vraiment s’amuser.
Ce fut interminable.
Sqweegel laissa s’écrouler le premier et le regarder sombrer dans l’inconscience. En voilà un qui n’oublierait jamais la leçon, et Sqweegel était ravi d’avoir pu la lui donner.
— À votre tour, maintenant. Qui préfère quoi ?
Les deux ados reculèrent en se tortillant comme des asticots. Sur le sol du cachot, des créatures livides, impuissantes, privées de membres, essayant d’esquiver leur destin.
— Eh bien, je suppose que c’est à moi de décider.
Rob ferma les yeux de toutes ses forces et pria le ciel comme jamais pour que ce ne soit qu’un atroce cauchemar.